Chemin de fer nigérien : vers la concrétisation d'un vieux rêve
Pays enclavé, le Niger est le parent pauvre de l'Afrique de l'Ouest en matière d'infrastructures de transport. Sur le plan ferroviaire en particulier, alors que le chemin de fer fut la condition fondamentale du développement économique tant en Europe qu'en Amérique du Nord ou en Chine, les lignes construites au temps de la colonisation puis dans les années postindépendances se sont toutes interrompues à quelques centaines de kilomètres des frontières nigériennes.
Dans de telles conditions, le transport et l'exportation tant des matières premières que des produits de l'agriculture ou de l'élevage relèvent du grand artisanat, y compris les exportations du minerai d'uranium. Si depuis des décennies, une multitude de réunions régionales a évoqué les projets de construction, toujours prioritaires, aucune action sérieuse n'a été entreprise pour concrétiser cette ambition au service du développement. A l'occasion d'une nouvelle conférence régionale sur le réseau ferroviaire ouest-africain organisée à Niamey le 29 novembre dernier, ces projets ont été une nouvelle fois mis sur la table, en particulier avec les bailleurs de fonds, sans cependant déboucher sur un plan d'action immédiat.
Le Président de la République Issoufou Mahamadou a clairement insisté dans son discours introductif sur la priorité très haute qu'il accordait à ce secteur et à la mise en œuvre rapide d'un projet de construction de la première ligne ferroviaire nigérienne et de son raccordement avec l'un ou plusieurs des pays voisins. Un groupe chinois assistait à cette conférence et a décidé de relever ce défi. CREC [China Railway Engineering Corporation] est en effet le premier groupe mondial de construction de chemin de fer et connaît bien l'Afrique pour avoir été le premier groupe chinois, en 1970, à se lancer dans un projet ferroviaire de grande envergure, le TAZARA, qui, construit entre 1970 et 1975 pour un investissement chinois de 500 millions USD, a permis à la Zambie, pays enclavé, d'être reliée au port tanzanien de Dar es-Salaam par une voie de 1 870 km, souvent considérée comme le plus grand ouvrage d'engineering de ce type depuis la seconde guerre mondiale. Le groupe CREC a donc décidé de soutenir les efforts de développement entrepris par le gouvernement nigérien pour les années à venir en proposant deux projets : d'une part la construction d'une première ligne ferroviaire Niamey-frontière du Burkina Faso qui serait ainsi ensuite reliée au chemin de fer burkinabé et permettrait aux matières premières et aux marchandises nigériennes d'accéder au port d'Abidjan, et d'autre part la construction d'une ligne beaucoup plus ambitieuse de 1 100 km reliant Niamey à Arlit et offrant ainsi à l'exploitation minière et au secteur de l'élevage un débouché vers les ports d'Abidjan ou, à terme, de Cotonou. L'impact économique de ces deux lignes serait considérable sur le développement du Niger et accentuerait la croissance économique de manière très significative.
Naturellement, le chemin de fer est à l'heure actuelle le secteur le plus coûteux à développer en matière d'infrastructures de transport et le gouvernement chinois, par l'intermédiaire de la banque de développement EXIMBANK, s'est récemment engagé à soutenir ce premier projet de ligne vers le Burkina Faso, dans l'attente de discussions plus approfondies sur la voie Niamey-Arlit. Soucieux de témoigner de son engagement aux côtés du Niger, le groupe CREC a récemment envoyé une mission technique d'une dizaine d'experts composée d'ingénieurs hautement qualifiés et d'experts économistes qui ont effectué des relevés de terrain très approfondis et des évaluations économiques qui vont permettre de finaliser très rapidement ce projet et de le placer dans le cadre du développement durable du Niger.
La présence, pour la première fois, d'un groupe de la dimension de CREC [3ème constructeur mondial d'infrastructures derrière deux groupes français] aux côtés du Niger dans la nouvelle phase qui a été lancée en 2011 représente un atout considérable et un gage majeur de succès, d'autant que les autorités chinoises, intéressées par la mise en œuvre d'une véritable politique de développement ont clairement exprimé leur volonté d'apporter leur concours financier et technique à cet effort de tous les Nigériens. La Chine a prouvé depuis trente ans que l'abnégation et le travail pouvaient conduire aux plus grandes réalisations - elle est devenue en 2011 la 2ème puissance économique mondiale - et encourage les pays en voie de développement à suivre cette voie.
Certes, les fruits de tels projets d'infrastructure ne peuvent être récoltés en quelques mois et l'effort doit être de longue haleine, mais les enjeux pour l'avenir du Niger sont suffisamment importants pour que l'opinion publique nigérienne consente à faire preuve de patience.
A découvrir aussi
- Club de Paris : opération annulation des dettes du Niger
- Niger : Les réserves pétroliers du Niger passent de 266 à 295 millions de barils
- Niger: La société civile exige la publication des nouvelles conventions minières signées avec Areva
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 13 autres membres