Ecrit par Sahel Dimanche du 20 mars 2009),
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Monsieur le député,
l'institution dont vous êtes membre du bureau, à savoir l'Assemblée
nationale, a été ces derniers temps, à tort ou à raison, la cible de toutes
les attaques, notamment par les organisations de la Société civile. Quelle
réaction vous inspire cette situation et peut-on considérer cette affaire
comme étant désormais close avec l'arrêt de la Cour constitutionnelle et la
promulgation de la loi portant statut du député dernièrement votée ?
Merci de nous avoir donné la parole. Effectivement, notre
institution était ces derniers temps au sein d'une controverse où nous
avons entendu toutes sortes d'opinions et même de méchanceté sur
l'Assemblée nationale et sur les députés à cause de la loi sur le statut de
ces derniers. Mais malheureusement, c'est aussi cela la démocratie. Je dis
malheureusement parce que, au-delà de ce qu'on peut dire sur les députés
pris individuellement, il faut que les Nigériens apprennent à respecter les
institutions de la République qui sont légitimement l'émanation de la volonté
du peuple nigérien. Le député en tant qu'élu national est représentant d'un
pouvoir ; le législatif a droit quand même à des égards et des avantages
sur le plan matériel pour qu'il puisse mener correctement la tâche dont l'a
investie le peuple.
Ce qui a été proposé et voté dans la loi portant statut
du député national n'a rien de gabégique gabégique. Le député, vu son rang
et la tâche qu'il est appelé à accomplir vis-àvis de ceux qui l'ont élu,
mérite tout à fait le traitement contenu dans le statut du député. Une fois
encore, nous n'avons aucun sentiment de haine contre la société civile.
C'est au contraire un vivier d'idées et de gens de bonne volonté que nous
estimons beaucoup pour ce qu'ils peuvent apporter comme contributions à
l'enracinement de l'Etat de droit et de la démocratie.
Et nous députés, nous ne disons pas détenir la vérité
absolue, et nous ne sommes pas à l'abri des erreurs. Et si nous avions
commis des erreurs, nous les avons corrigées. Mais nous n'avons jamais
compris pourquoi certaines associations de la société civile se sont
braquées uniquement sur l'Assemblée nationale avec un rare acharnement.
Malgré tout le discrédit que certains tentent de jeter sur l'Assemblée
nationale, moi personnellement, je suis fier de porter le titre de député
et fier du mandat que le peuple nigérien m'a confié jusqu'à ce qu'il en
décide autrement dans quelques mois.
Et je n'ai pas peur de parler en nommant des gens. Je
considère que certaines personnes qui sont entrain d'orchestrer cette
fronde contre l'Assemblée ont tort de le faire parce que tout simplement
ils ont des problèmes personnels avec tel ou tel individu député. Les
individus ne font que passer, mais l'institution reste et elle a droit aux
égards de tous les citoyens. L'Assemblée nationale, c'est le coeur et le
temple de la démocratie. Mais Dieu merci, la loi sur le statut du député a
bien passé le contrôle de constitutionalité, et le Président de la
République l'a promulguée.
On ne peut pas chercher mieux en termes de légalité. Pour
nous, cette affaire portant sur la loi sur le statut du député est close.
Si quelque part des gens qui se réclament et se proclament champions de la
légalité et du respect des lois de la République trouvent encore à redire
et à s'agiter sur cette loi, ils ne le font plus contre l'Assemblée
nationale, mais contre les institutions et les lois de la République du
Niger.
A quelques mois de la fin de la
législature, quel bilan le Secrétaire parlementaire que vous êtes peut
faire du travail abattu par l'Assemblée nationale. Est-ce que vous pensez
avoir bien rempli votre mandat de député ?
Nous sommes l'une des meilleures Assemblées nationales
de la sous-région par la vitalité et la qualité de l'exercice démocratique
et le rôle de notre parlement. Qu'il s'agisse du contrôle de l'action
gouvernementale, du vote des lois, de l'initiative des lois et bien
d'autres rôles dévolus à une institution, nous l'avons fait en toute
liberté et en toute transparence, et avec tout le caractère public qu'une
représentation nationale doit donner à ses actions.
Mieux, nous avons mis en place beaucoup de réseaux
parlementaires sur diverses importantes questions de développement et qui
font un travail actif et visible à l'endroit des populations nigériennes.
Conscients de la situation de notre pays, nous avons donné toute sa
signification à la diplomatie parlementaire. Nous estimons que si les gens
ont la possibilité de comparer avec bien des parlements, celui du Niger n'a
pas démérité. Mais je suis également convaincu que nous pouvons toujours
mieux faire.
On nous reproche d'être une Assemblée nationale qui
compte beaucoup d'élus illettrés. Moi, j'estime qu'il faut respecter le
choix du peuple nigérien. Notre pays est aussi un pays composé
majoritairement de gens qui n'ont pas été à l'école. Cela n'enlève en rien
à leur quali qualité de citoyens nigériens. C'est la même chose que ces
élus que l'on dit illettrés. C'est leur droit de Nigériens à part entière
qui les a amenés là où ils sont. Un jour, les choses peuvent évoluer et on
aura la totalité du parlement composé par des personnes sachant lire et
écrire dans la langue officielle et de travail.
Mais même à l'heure actuelle, moi je pense que ces élus
que l'on dit illettrés font de leur mieux pour participer au travail et aux
débats parlementaires qui sont, je vous le précise, simultanément traduits
dans nos principales langues nationales. Ayons la patience de voir évoluer
cette situation. Il fut un temps où l'Assemblée nationale ne comptait pas
plus d'une femme député. Elles constituent aujourd'hui 10% des 113 députés.
Justement, l'une des meilleures
initiatives en matière de loi vient de vous-mêmes, à travers votre
proposition de loi portant régime de la liberté de presse dont l'examen et
l'adoption sont programmés au cours de la présente session. Pourquoi et
quel est le sens de cette proposition de loi ?
Au cours des multiples audiences et rencontres des
autorités de ce pays avec les structures et organisations de la presse,
notamment privée, on est arrivé à proposer et à faire la promesse de la
dépénalisation du délit de la presse. Avant d'être député, j'étais
journaliste et promoteur d'une entreprise de presse. Je connais la grandeur
et la noblesse de métier de journaliste mais aussi hélas, tous les
problèmes qui sont liés à l'exercice de ce métier dans le contexte de
l'Afrique et de notre pays.
Certains sont venus au journalisme par passion, d'autres
l'exercent parce qu'il leur faut tout simplement un métier, mais il se
trouve que beaucoup n'ont pas de formation solide pour l'exercer. Moi je
pense qu'il faut les aider. Le Niger, pays de démocratie et d'Etat de
droit, a droit à des organes de presse libres et indépendants. Il se trouve
que nous avons cette presse libre et indépendante qui a pour le moment des
carences et des défauts.
Il faut l'accepter comme telle, en attendant qu'elle
aussi évolue avec le temps. D'où ma proposition de loi qui, en réalité,
consiste à dépénaliser le délit de presse. Il ne sert à rien, pour une
démocratie, de se réveiller chaque matin avec des journalistes en prison et
souvent pour des actes qui n'en valent pas la peine. Mais loin de nous
l'idée de pousser les journalistes à l'irresponsabilité. Nous voulons
simplement, pour l'existence d'une presse libre et indépendante nécessaire
au règne de la démocratie, il faut pour des simples faits de diffamation,
éviter au journaliste le pénal en privilégiant par exemple la sanction
pécuniaire.
Mais une fois encore, ce n'est qu'une proposition de loi
et j'invite, avant son examen en plénière, toutes les organisations et
structures de presse à venir, s'il le faut, en commission pour en discuter
ou l'enrichir. Et même si cette proposition de loi est adoptée, notre souci
est de voir se créer les conditions de formation et de professionnalisation
du métier de journaliste à travers le concours de l'Etat, des partenaires
et de toutes les bonnes volontés afin que le journaliste nigérien soit à un
niveau de conscience professionnelle qui lui interdise de commettre le
délit pour lequel nous demandons la dépénalisation.
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